« Nul n'échappe à la publicité de mode », dit Laure Bonicel, et cette emprise est profonde. Les attitudes corporelles elles-mêmes sont façonnées par les mythologies ambiantes et les images qui nous environnent en permanence. Ce modelage des corps et des postures est d'autant plus puissant qu'il est subliminal. D'où l'intérêt d'en interroger les ressorts et les effets, pour les désamorcer peut-être.
Aux côtés des cinq danseurs de sa compagnie, Laure Bonicel a entraîné dix amateurs dans la présentation de son projet au CND. Un travail intense a été mené en commun autour de règles de composition proposées par la chorégraphe, assistée de Christine Bombal.
Les photos publicitaires, relayées par d'autres d'images appartenant à des registres tout aussi codifiés ou connotés, ont servi de tremplin thématique. Mais le travail préparatoire s'est essentiellement concentré sur l'acquisition d'une qualité de présence et d'écoute mutuelle.
Certaines parties de la chorégraphie sont écrites, mais la plupart des séquences se réinventent à chaque représentation sur le mode d'une « composition instantanée ». Le travail en amont est cependant d'une telle cohérence que la chorégraphie paraît couler de source, comme si une pulsation partagée animait les évolutions des performers dans l'espace.
Des groupes se font, prennent la pose et se défont, composant autant d'images et d'attitudes qui semblent émaner d'un creuset culturel collectif. Des singularités finissent pourtant par en surgir.
Car en sondant cette matière commune dont nos gestes sont tissés, c'est au bout du compte l'incessant travail de la différence qui se trouve exalté.

Annie Suquet

Dernière mise à jour : mars 2010

Formée au CNDC d'Angers et interprète de 1989 à 1998 auprès d'Anne Teresa de Keersmaeker, d'Odile Duboc et de Mark Tompkins, Laure Bonicel débute sa propre recherche chorégraphique en 1992 et fonde la compagnie Moleskine en 1993. 

Son œuvre est traversée par la question de l'identité, abordée à travers l'image, le jeu d'une construction de l'être par fragments accumulés.
Son travail sur le corps-sujet / corps-objet induit un rapport systématique du corps au grimage, aux vêtement, aux accessoires, au travestissement, à la transformation.
Très tôt, Laure Bonicel développe sa démarche artistique en employant des moyens et des résolutions autant chorégraphiques que plastiques. Elle affirme cette démarche au travers des pièces actuelles qui déploient un langage performatif proche de l'installation plastique. Les corps des danseurs sont chorégraphiés comme des sculptures en mouvement : pour cela, Laure Bonicel emploie des moyens graphiques et utilise régulièrement un processus temporel étiré permettant de passer de la forme à l'informe.

Laure Bonicel mène également une réflexion sur la transmission de sa démarche artistique auprès du public. Pour cela elle propose de composer, en partenariat avec les structures d'accueil, un programme spécifique à chacune, en présentant plusieurs pièces en diffusion à différents moments de l'année et dans plusieurs espaces de représentations. Ces programmes sont accompagnés de rencontres et ateliers de pratiques en relation avec le travail de création qu'elle mène avec les collaborateurs artistiques de la compagnie.

Source : Compagnie Moleskine

Dernière mise à jour : mars 2010

Depuis 2001, le Centre national de la danse (CND) réalise des captations de ses programmations de spectacle et de pédagogie et crée des ressources à partir de ces représentations filmées (interviews, conférences dansées, rencontres avec des artistes, démonstrations, grandes leçons, colloques spécialisés, montages thématiques, etc.).