Corps dansants
2018 - Réalisateur-rice : Plasson, Fabien
Chorégraphe(s) : Brumachon, Claude (France) Hoghe, Raimund (Germany) Orlin, Robyn (South Africa) Dubois, Olivier (France) Rizzo, Christian (France) D'Urso, Maria Donata (Italy) Linehan, Daniel (United States) Fontaine, Geisha (France) Cottreau, Pierre (France)
D'indicibles violences
Brumachon, Claude (France)
2014 - Réalisateur-rice : Centre national de la danse, Réalisation
Chorégraphe(s) : Brumachon, Claude (France) Lamarche, Benjamin (France)
Producteur vidéo : Centre national de la danse
Vidéo intégrale disponible au CND de Pantin et à la Maison de la danse de Lyon
Sans Titre
Hoghe, Raimund (Germany)
2009
Chorégraphe(s) : Hoghe, Raimund (Germany)
Producteur vidéo : Maison de la Danse/Montpellier danse
Vidéo intégrale disponible à la Maison de la danse de Lyon
Cygne - Daddy, I've seen this piece six times before and I still don't know why they're hurting each other
Orlin, Robyn (France)
2006 - Réalisateur-rice : Centre national de la danse, Réalisation
Chorégraphe(s) : Orlin, Robyn (South Africa)
Producteur vidéo : Centre national de la danse
Vidéo intégrale disponible au CND de Pantin
The Spectator's moment (2013): Olivier Dubois
Dubois, Olivier (France)
2013 - Réalisateur-rice : Plasson, Fabien
Chorégraphe(s) : Dubois, Olivier (France)
Producteur vidéo : Maison de la danse de Lyon
Vif du sujet (Le) : Skull*Cult
Rizzo, Christian (France)
2002
Chorégraphe(s) : Rizzo, Christian (France) Ouramdane, Rachid (France)
Producteur vidéo : La Compagnie des Indes, Mezzo, Association Fin Novembre
Collection particulière
D'Urso, Maria Donata (France)
2006 - Réalisateur-rice : Picq, Charles
Chorégraphe(s) : D'Urso, Maria Donata (Italy)
Producteur vidéo : Disorienta;Maison de la Danse
Vidéo intégrale disponible à la Maison de la danse de Lyon
Zombie Aporia
Linehan, Daniel (France)
2011 - Réalisateur-rice : Centre national de la danse, Réalisation
Chorégraphe(s) : Linehan, Daniel (United States)
Producteur vidéo : Centre national de la danse
Vidéo intégrale disponible au CND de Pantin
LEX
Fontaine, Geisha (France)
2003 - Réalisateurs : Geisha, Fontaine - LEX
Chorégraphe(s) : Fontaine, Geisha (France) Cottreau, Pierre (France)
Corps dansants
2018 - Réalisateur-rice : Plasson, Fabien
Chorégraphe(s) : Brumachon, Claude (France) Hoghe, Raimund (Germany) Orlin, Robyn (South Africa) Dubois, Olivier (France) Rizzo, Christian (France) D'Urso, Maria Donata (Italy) Linehan, Daniel (United States) Fontaine, Geisha (France) Cottreau, Pierre (France)
Auteur : Centre national de la danse
Découvrir
L’un des enjeux de la danse contemporaine consiste à voir, à approcher et à travailler le corps de façon différente que dans les périodes antérieures. Il s’agit de favoriser une « exploration du corps comme matière sensible et pensante »[1].
Cette démarche est en résonance avec les transformations des représentations du corps dans les sociétés industrialisées à partir des années 1960. On privilégie alors un corps moins contraint, susceptible de se livrer à de multiples expériences.
Les chorégraphes et les danseurs contemporains cherchent à subvertir un corps dansant trop formaté. Ils veulent échapper aux modèles et interroger ce qui définit, mais aussi limite, le « corps dansant ».
Par ailleurs la pratique, la perception et l’expérimentation du corps sont déterminantes dans le travail du danseur contemporain. Il cherche à affiner la conscience de son propre corps, tandis que le chorégraphe cherche à mobiliser différentes compétences du corps. Selon son style et ses enjeux esthétiques, il ne fera pas appel aux mêmes corps et donc aux mêmes interprètes.
Ce Parcours « Corps dansants » est l’occasion de s’interroger sur la variété des corps que propose la danse contemporaine, des corps glorieux aux corps « disgracieux », et sur la plus ou moins grande visibilité de certains corps. Mais c’est aussi la manière de montrer le corps qui varie : entre nudité complète et corps tout à fait caché ou recouvert. On regardera aussi comment le corps danse, qu’il soit « expert » ou amateur, et quelles sont les modalités de sa présence en scène.
[1] Annie Suquet, « Le corps dansant, un laboratoire de la perception », in Histoire du corps – Les mutations du regard, Le XXe siècle, Seuil, 2006, p. 413
Description
1. Contre le modèle
d’Indicibles Violences
Dans d’Indicibles Violences, chorégraphie de Claude Brumachon, le corps des danseurs est un corps virtuose, sportif, agile. Il exprime une animalité virile qui, selon les mots du chorégraphe, « voyage à l’intérieur d’un volcan de chair extrême »[1]. Ce corps renvoie aussi à la statuaire grecque ; il est sculptural et relève de critères de la beauté « classique ». Il est expert et admirable. C’est un modèle de corps présent en danse contemporaine, mais dont d’autres chorégraphes ont voulu s’émanciper.
Sans titre
Raimund Hoghe a souhaité « jeter son corps dans la bataille ». Il pense que « les handicaps physiques choquent plus que la violence sur scène » et propose un « plaidoyer pour l'imperfection »[2]. Raimund Hogue, chorégraphe et danseur allemand, est bossu et son corps subvertit tous les canons attribués au corps du danseur. Dans Sans titre, son corps dialogue avec celui de Faustin Linyekula, danseur congolais noir. Cette chorégraphie, qui confronte l’Afrique et l’Occident, met en jeu des corps que la danse contemporaine a acceptés petit à petit. Peau noire et bosse blanche deviennent ici un médium artistique et poétique.
Questionner les représentations du corps est également un enjeu de la sud-africaine Robyn Orlin. La chorégraphe critique l’utilisation idéologique de critères physiques, notamment dans Daddy, I’ve seen this piece six times before and I still don’t know why they’re hurting each other... Dans cette pièce, une danseuse se couvre de farine pour devenir un impeccable cygne blanc - ce référent incontournable de la culture du ballet occidental. Le corps modèle du danseur est ainsi relativisé et questionné. La danse contemporaine met en jeu une diversité de corps dansants, en écho à cette interrogation de Raimund Hoghe : « Je pose la question du combien et comment dans le Troisième Reich l'exclusion fut possible, et celle du combien et comment elle l'est toujours. Qu'est-ce qui se passe aujourd'hui avec nos corps ? »
Olivier Dubois – La minute du spectateur
La danse contemporaine fait ainsi appel à des corps atypiques et variés. Le danseur et chorégraphe Olivier Dubois, quant à lui, a des formes « généreuses ». Dans ses premières créations, il confronte l’exhibition de son corps à ce qui relève de son intimité. À propos de sa première chorégraphie, il écrit : « J’entre en résistance. Pour tout l’or du monde…, je l’ai voulu comme une chronique d’un martyr, un précis de guerre... » Olivier Dubois participe d’une lutte des corps destinée à conquérir une place, et notamment sur un plateau. Le chorégraphe a d’ailleurs interprété le rôle du Faune, en écho à la chorégraphie mythique de Nijinski L’après-midi d’un faune qui est généralement interprétée par des danseurs à la beauté bien plus conventionnelle. Dans ses propositions, le corps de Dubois ne se distingue plus par ses données physiques, mais par la mise en jeu artistique qu’il exprime. Tout corps peut ainsi devenir un vecteur, un allié et le signe prépondérant d’un engagement esthétique.
Skull*Cut
En danse contemporaine, le corps du danseur est aussi parfois nu. La nudité est un moyen de restituer au corps dansant son plus simple appareil. Mais le corps peut aussi être caché. Dans Con forts fleuve créé par Boris Charmatz en 1999, les corps sont totalement couverts, y compris le visage qui est masqué par un pull-over. Dans Skull*Cut, chorégraphie de Christian Rizzo, le danseur et chorégraphe Rachid Ouramdane a l’apparence d’un motard, de la tête (casquée) aux pieds (bottés). Il devient ainsi une silhouette, à la fois humaine et indéfinie. C’est un corps reconnaissable dont les volumes et les postures ressortent bien davantage que si le visage et la peau étaient visibles. La figure du motard est un archétype ; mais telle qu’elle est employée ici, elle décale les données relatives au corps dansant. Il en résulte une impression étrange où l’on est troublé par un corps en mouvement que l’on perçoit, mais sans vraiment identifier la personne que l’on regarde.
2. Travail et présence du corps
Collection particulière
Le corps est une entité étrange que de nombreux chorégraphes transforment jusqu’à le rendre méconnaissable. Il leur importe d’utiliser le corps en explorant de nouvelles possibilités ou en se concentrant sur une donnée physique. Dans Collection particulière, Maria Donata d’Urso travaille sur la plasticité de son corps et propose des images étonnantes où les contours corporels se modifient radicalement. Elle insiste particulièrement sur le rôle de la peau et des appuis. Elle interroge « la notion de surface qu’elle ressent dans le contact physique avec le sol, mais aussi dans l’espace de visibilité de la scène »[3]. Selon la journaliste Rosita Boisseau, Collection particulière est « un solo obsédé par la matière du corps qui taille le geste à même la masse charnelle »[4]. Ce corps matière devient une sculpture abstraite, en mouvement, et joue de la dissymétrie. Il est ici le sujet de multiples métamorphoses qui lui donnent d’infinis prolongements.
Zombie Aporia
Quand il est sur scène, le danseur associe une compétence technique, un mode d’interprétation et une forme de présence. Or la manière dont le corps s’offre au regard du public varie selon les danseurs et selon le style des chorégraphes avec lesquels ils travaillent. Dans Zombie Aporia, créé par Daniel Linehan en 2011, les trois danseurs, par leur interprétation, induisent une relation directe et enfantine avec les spectateurs. Les danseurs s’engagent dans les relations entre ce que l’on fait, ce que l’on danse, ce que l’on dit et ce que l’on chantonne, comme si de rien n’était. Cette évidence finit néanmoins par entraîner les spectateurs dans des stratagèmes beaucoup plus complexes qui se font jour au fur et à mesure de la pièce. En effet, « cette comédie musicale d’apparence légère s’avère être un manifeste contre le conditionnement des corps et des esprits »[5].
LEX
Le regard porté sur l’interprète dépend des attentes des spectateurs par rapport à ce qu’est un danseur et des représentations du corps qu’ils y associent. Le corps est le support de multiples projections et affects, y compris à l’intérieur du champ chorégraphique. En effet, chorégraphes, programmateurs et critiques se réfèrent eux aussi à une certaine image du danseur et de son corps.
Geisha Fontaine et Pierre Cottreau ont conçu LEX en s’emparant des expressions convenues de la critique chorégraphique pour désigner le corps du danseur. Le meilleur danseur serait-il celui qui est le plus virtuose, le plus émouvant, le plus beau, etc. ? Les deux chorégraphes mettent en relation les qualités du « bon » danseur et son inscription dans le champ du travail et des lois qui le régissent. Selon quels critères un danseur réussit-il l’audition pour être recruté ? Comment fait-il ensuite preuve de ses compétences d’artiste dans le travail avec le chorégraphe ? Sur quoi se fonde la valeur qu’on lui accorde ? LEX s’empare de plusieurs atouts prêtés au danseur et de figures récurrentes de la chorégraphie (ralenti, enchainement, unisson, canon, solo, duo, quatuor) pour interroger la fonction du danseur interprète. « Et si, malgré sa charge expérimentale et subjective, la création artistique n’était qu’un sous-ensemble de la “société globale”, du grand bazar commercial ? »[6]
Jeu de société
Le corps du danseur est bien au centre de la création en danse, mais certains chorégraphes souhaitent parfois créer avec des corps « ordinaires », non spécialisés dans la danse. C’est un moyen de traiter le mouvement et la présence scénique dans une démarche qui se distingue fortement du travail avec les professionnels. Les formats de ces réalisations sont multiples : spectacles, films, photos. Philippe Jamet, par exemple, a réalisé de nombreux films avec des amateurs qu’il a rencontrés dans de nombreux pays, ce sont les Portraits dansés. Pour Jeu de société, la chorégraphe Stéphanie Aubin s’est associée au photographe Arnaud Baumann afin de créer une danse composée de poses prises par des habitants d’une ville. Grands et moins grands, masculins et féminins, jeunes et moins jeunes, les corps sont multiples et « inventent devant l’objectif un mouvement commun, chacun partant de la position de son prédécesseur et imaginant la suite de son élan »[7]. Une centaine de Rémois se passent ainsi le relais. Il en résulte une chorégraphie plurielle où le mouvement se construit et se décompose simultanément, un peu à la manière du photographe Eadwaerd Muybridge (1830-1904) dont les clichés rendent compte des diverses phases du mouvement.
Jeu de société – Remix
Jeu de société – Remix reprend les mouvements de Jeu de société. Le danseur Frédéric Seguette s’approprie la chorégraphie et en propose une version savoureuse où il joue avec les absents, leurs corps et leurs expressions. Les postures des amateurs qui ont été photographiées et animées par la chorégraphe Stéphanie Aubin deviennent le matériau du danseur qui les complexifie parfois. Il injecte ainsi un nouvel élan à un saut, aiguise la vivacité d’un tour ou encore amplifie un cambré. Jeu de société – Remix renverse la situation plus fréquente où des amateurs s’emparent d’une proposition faite par des professionnels.
[1] Claude Brumachon, présentation de la création - www.ccnn-brumachonlamarche.com
[2] Jeter son corps dans la bataille - www.raimundhoghe.com
[3] Citée par Gwénola David, « Maria Donata d’Urso - L’interprète du corps », Danser, mai 2005.
[4] « Collection particulière », Rosita Boisseau, le Monde, 5 juin 2005.
[5] Présentation de Daniel Linehan, Arte Journal, 14 novembre 2011- www.arte.tv
[6] Florence Marguerat, « Aveux d’une nouvelle Lex », Journal de l’ADC, n° 34, septembre-décembre 2004.
[7] Présentation de Jeu de société - www.manegedereims.com
Auteur
Le Centre national de la danse (CN D) est un centre d’art pour la danse. C’est une institution dépendant du ministère de la Culture et de la Communication français et dévolu à la danse sous tous ses aspects : la promotion de spectacles et de chorégraphes, la diffusion de la culture chorégraphique, la création artistique, et la pédagogie.
Générique
Sélection des extraits
Centre National de la danse
Textes
Centre National de la danse
Le Parcours « Corps dansants » a pu voir le jour grâce au soutien du Secrétariat général du Ministère de la Culture et de la Communication - Service de la Coordination des politiques Culturelles et de l'Innovation (SCPCI).