Carolyn Carlson, a woman of many faces
- UNE FORMATION AUPRÈS DE GRANDS MAÎTRES
- UNE CARRIÈRE AU FIL DES VILLES ET DES RENCONTRES
- UNE SOLISTE INCARNÉE
- LA POÉSIE VISUELLE
UNE FORMATION AUPRÈS DE GRANDS MAÎTRES
Carolyn Carlson, d’origine finlandaise, est née en Californie, à Oakland, aux portes de l’Océan Pacifique. Elle intègre la San Francisco School of Ballet et l’Université d’Utah avant de partir pour Salt Lake City chez Joan Woodbury, élève de Mary Wigman. Elle découvre le travail de la chorégraphe et pédagogue Anna Sokolov. Cette rencontre lui offre l’occasion d’interpréter son premier solo.
En 1965, Carolyn Carlson rejoint New York et le Nikolais Dance Theater dont elle devient rapidement l’une des principales solistes.
Alwin Nikolais, qu’elle définit toujours comme son maître, a profondément influencé sa conception du mouvement, de la lumière et de la musique. De l’artiste au talent protéiforme, elle a retenu l’idée du spectacle total résultant d’une harmonie entre ses différentes composantes. Du chorégraphe, elle a hérité une conception du corps dansant en quatre principes : le temps, l’espace, la forme et le mouvement perpétuel. Du pédagogue, elle a intégré le goût de la transmission, et la conviction que création et apprentissage sont indissociables : l’on ne crée que parce que l’on découvre.
UNE CARRIÈRE AU FIL DES VILLES ET DES RENCONTRES
PARIS
En 1970, quelques mois après s’être éloignée de Nikolais pour développer ses propres projets, Carolyn Carlson part pour la France. C'est en 1973, après la présentation de son Density 21,5, que Rolf Liebermann, compositeur et administrateur visionnaire de l’Opéra de Paris, offre à Carolyn Carlson le titre d’étoile-chorégraphe. Elle rassemble un groupe de danseurs qui devient le GRTOP (Groupe de Recherche Théâtrale de l’Opéra de Paris), installé dans la Rotonde de l'Opéra Garnier.
De 1974 à 1980, le GRTOP représente une période d’incroyable créativité pour Carlson, il lui permet de se consacrer à un travail expérimental au sein de l’Opéra ; travail dont bénéficiera la jeune danse contemporaine française.
Ces années sont aussi marquées par une nouvelle rencontre majeure, le compositeur René Aubry, avec lequel elle entame une collaboration qui durera presque 30 ans.
VENISE
En 1980, Carolyn Carlson prend le chemin de l’Italie. Invitée par le Teatro La Fenice à Venise, elle crée une nouvelle compagnie : le Teatrodanza La Fenice. Celle-ci compte dans ses rangs une part de ceux qui constitueront la première génération de chorégraphes contemporains italiens : Caterina Sagna, Rafaella Giordano, Roberto Castello, Michele Abbondanza, Giorgio Rossi, Luisa Casiraghi...
Le Teatrodanza La Fenice produira Undici Onde (1981), Underwood (1982) et Chalk work (1983). Cette période est aussi marquée par la poursuite de la complicité avec René Aubry, son compagnon. Ils réalisent leur collaboration majeure, Blue Lady.
Après plusieurs années loin de l’Italie, Carolyn retournera à Venise en 1999, pour diriger la Biennale de la Danse de Venise, et y créer une Académie.
FINLANDE ET SUÈDE
Au début des années 90, son parcours la ramène vers la Finlande, pays de ses ancêtres. Elle y fait la rencontre du danseur Tero Saarinen. Elle crée Syyskuu (1992), pour la Helsinki City Theatre Dance Company.
En 1993 elle accepte la direction du Ballet Cullberg pour une interlude de 2 saisons, elle y introduit l’improvisation et y créé Sub Rosa.
RETOUR EN FRANCE
De retour à Paris en 1997, elle crée Signes avec le peintre Olivier Debré et René Aubry pour le Ballet de l’Opéra de Paris. De la rencontre entre la chorégraphe et le peintre nait un ballet évidemment et brillamment pictural, proche du théâtre total, porté par les étoiles.
Signes
En 1999 elle fonde avec Pierre Barnier, l’Atelier de Paris – Carolyn Carlson à la Cartoucherie. Outre ses propres masterclass, elle convie les plus prestigieux artistes de la scène internationale à enseigner, comme Susan Buirge, Meredith Monk, Lucinda Childs ou Trisha Brown...
Pendant cette période, elle crée notamment le trio Tigers in the tea house (2004), fruit de l’inclinaison de la chorégraphe pour l’Orient et le bouddhisme zen.
En 15 ans, la dynamique qu’elle a su insuffler à l’Atelier de Paris (devenu depuis CDCN dirigé par Anne Sauvage) lui confère un rôle moteur dans le paysage chorégraphique francilien.
En 2005, elle est nommée à la direction du Centre Chorégraphique National Roubaix Nord-Pas de Calais, période très prolifique avec plus de dix pièces créées en 9 ans. C'est là-bas qu’elle signe Inanna, bouleversante pièce de 7 femmes. L’arrivée à Roubaix correspond à la constitution d’une nouvelle compagnie, tissée d’anciennes danseuses rencontrées en Italie, d’interprètes de l’ex Ballet du Nord et de danseurs rencontrés par la chorégraphe au cours de ses pérégrinations... Comme au GRTOP ou à Venise, la compagnie constitue une pépinière de jeunes créateurs que la chorégraphe soutient et encourage.
En 2008, elle transmet son solo Blue lady à 2 hommes, Tero Saarinen et Jacky Berger. En 2013, dernière année en tant que directrice du CCN de Roubaix, elle danse Dialogue with Rothko.
Depuis 2014 c’est au sein de la Carolyn Carlson Company fondée avec Claire de Zorzi - à ses côtés depuis 2001, que la chorégraphe, forte d’un répertoire hors norme, trouve son espace de créativité et de liberté poétiques. D’abord associée pendant 2 saisons au Théâtre national de Chaillot, cette artiste visuelle nomade, continue de créer, de transmettre, et de faire voyager ses œuvres à travers le monde.
C'est en mai 2021, en pleine pandémie, qu’elle dévoile sa dernière grande pièce pour sa Compagnie : The Tree, une réflexion poétique sur l’humanité et la nature, au bord du naufrage... Après Eau, Pneuma et Now, elle vient clore le cycle de pièces inspirées par Gaston Bachelard.
UNE SOLISTE INCARNÉE
Le solo est la forme de prédilection de Carolyn Carlson. Depuis Density 21.5 qu’elle créée en 1973, elle n’a cessé d’alterner création de groupe/ballet et soli pour elle-même ou des danseurs qui l’inspirent profondément.
La création d’un solo est pour elle le moment d’un rapport direct à la danse, la possibilité d’un retour sur soi. Cette démarche relève avant tout du dialogue intime, sans explications, sans mots, à la recherche de la note ultime du geste unique et pur.
Ses soli sont autant de points de repère qui jalonnent sa carrière de chorégraphe et d’interprète. Après Density 21.5, c’est Blue Lady (1983), solo d’une liberté et d’une maîtrise totale, qui deviendra sa pièce emblématique, représentée dans le monde entier pendant dix ans. Créée avec René Aubry après la naissance de leur fils, cette pièce devient majeure dans son répertoire.
Irrémédiablement, Carolyn Carlson revient au solo, comme en quête de sa propre essence. La danse est à ses yeux l’objet d’une recherche émotionnelle concrète par l’intermédiaire du corps. Dans un monde toujours plus bavard et individualiste, qui souffre de notre incapacité à exprimer notre humanité profonde, la danse offre une communication visuelle par l’émotion, par la perception, sans le détour de la parole.
LA POÉSIE VISUELLE
Au terme "chorégraphie", Carolyn Carlson préfère celui de "poésie visuelle" pour désigner son travail. L’univers poétique et spirituel qui est le sien s’exprime par plusieurs mediums : la danse bien sûr, mais aussi l’écriture, la calligraphie et une passion depuis toujours pour les arts visuels et le cinéma. Se définissant souvent comme une créatrice d’images (“Image Maker”), elle garde d’ailleurs le rêve depuis des années de réaliser un film muet, rythmé par le souffle des danseurs et la recherche du geste unique.
Cette approche se prolonge par les Poetry Events, formes spectaculaires mêlant danse et poèmes, accompagnées de musicien live, régulièrement diffusés dans des lieux atypiques, patrimoniaux ou dans des musées.
C'est à travers la poésie et le trait, que l’invisible devient visible, en contrepoint du geste éphémère de la danse que l’artiste définit comme l’art d’un instant dans le temps et l’espace.
En 2017, le musée La Piscine de Roubaix inaugurait un cycle de plusieurs expositions en France, présentant pour la première fois au public l’œuvre graphique de la chorégraphe.
Le succès de ces expositions et la pertinence de cet « autoportrait » de l’artiste ont conduit Hélène de Talhoüet (commissaire de ces expositions) à imaginer avec la Carolyn Carlson Company une malle-expo, « le geste peint », où carnets, série de dessins de décor mouvant et croquis de scène sont présentés.
"Dans mes créations, les rêves ont toujours été une manifestation de ma poésie visuelle. Le geste, l’énergie des mouvements de la danse engendrent des émotions, des perceptions spirituelles et imaginatives.
Mon travail en tant que chorégraphe et créatrice d’images est de partager des expériences qui nous montrent une autre façon de voir notre propre nature, à travers le processus de nos pensées, nous plongeant dans le mystère de nous-mêmes…"